26/01/2025
Les Assises Nationales de la Mise en Scène, vous l’avez compris, représentent bien plus qu'une simple rencontre entre professionnels : elles incarnent une manifestation inédite par son ampleur et son ambition, fière d’avoir réussi à réunir des metteuses et metteurs en scène de tout horizon, sur l’ensemble du territoire, y compris d’Outre-mer. Elles ont créé une dynamique collective passionnante qui a permis, en échangeant sur nos expériences, de collecter une matière d’une grande richesse pour accompagner l’évolution de notre art. Elles offrent une plateforme unique pour échanger et réfléchir aux enjeux qui nous touchent toutes et tous. Elles reflètent, au-delà de la pluralité de nos esthétiques et de nos disciplines, notre engagement commun envers cet art vivant profondément ancré dans notre société.
Je tiens à remercier les nombreuses organisations professionnelles et institutionnelles présentes ici pour leur accompagnement ou leur soutien. Votre présence aujourd’hui témoigne d’un engagement concret envers notre profession et envers celles et ceux qui œuvrent chaque jour pour faire vivre la culture. Je remercie également du fond du cœur l’équipe des Assises, Stéphane, Dina, Violette, Pablo et Jean mais également l’ensemble des membres de la commission Assises du SNMS, sans oublier notre trois rapporteuses Gwenola, Olivia et Marie-Pia.
Dès à présent, les cinq chantiers prioritaires que nous avons déclinés lors de cette séance conclusive appellent à des travaux et des actions qui relèvent de plusieurs catégories :
Tout d’abord, sur les questions relatives à notre statut juridique et social d’artiste et d’auteur, ainsi que sur le cadre réglementaire et les conditions de travail dans lesquels nous exerçons notre profession, nous engagerons dans les meilleurs délais des négociations avec les partenaires sociaux, les institutions représentatives du secteur et l’Etat.
Ensuite, sur le chantier de la formation initiale à la mise en scène, nous sommes prêts à collaborer avec les ministères concernés et les établissements d'enseignement supérieur et conservatoires. Il faut aider à développer des programmes de formation qui répondent aux besoins des futurs metteuses et metteurs en scène. Nous serons particulièrement attentifs à certains éléments de cette formation comme la question de la diversité qui est au cœur des enjeux de la formation initiale. En effet, si nous voulons rendre la culture accessible à toutes et tous, il faut rendre les conditions d’accès à la formation à la mise en scène également accessible à toutes et tous, sans exception, pour que d’autres imaginaires puissent être représentés sur scène.
Pour autant, les écoles ne sont pas la seule réponse à la formation initiale. Il y en a d’autres comme la transmission. Nous devons envisager pour cela le renforcement de dispositifs comme celui du compagnonnage qui permettent aux jeunes professionnels d'apprendre directement des praticiens expérimentés.
En ce qui concerne l’offre de formation continue, il est important qu’elle soit soutenue et qu’elle évolue pour proposer des formations spécifiques aux metteuses et metteurs en scène, disponibles tout au long de leur parcours professionnel, afin d’encourager la mise à jour régulière des compétences artistiques et techniques. Nous travaillerons en lien avec les organismes de formation, l’Etat et les collectivités territoriales qui jouent un rôle important dans le soutien à la formation.
Enfin, sur les combats qui sont à mener pour une nouvelle éthique de la scène, nous constituerons un groupe de travail composé de metteuses et metteurs en scène et de juristes afin d’aboutir à la création d’une charte de déontologie du métier. Cette charte permettra d’identifier et de clarifier nos valeurs et les principes éthiques que nous souhaitons collectivement promouvoir dans la pratique de la mise en scène, tels le respect de la personne, l’engagement envers la diversité et l’inclusivité ou notre responsabilité sociale et environnementale. Une fois établie, cette charte sera diffusée et pourra donner lieu à des sessions d’évaluations.
Nous l’avons dit, nous vivons une époque complexe où les défis semblent tous les jours plus nombreux. C'est dans ce contexte que je lance un appel à toutes et à tous pour que la dynamique de ces assises perdure et que nous œuvrions collectivement à l’aboutissement des cinq chantiers qui ont été dégagés de cette consultation nationale. Je n’oublie pas également l’urgence d’agir alors que des coupes budgétaires drastiques frappent la Culture, mettant en péril notre écosystème et l’accès à la culture pour tous. Nous fiers de mener ces combats collectivement au sein de la Fédération CGT du Spectacle.
Par ces engagements pris devant vous, nous, Syndicat National des Metteuses et Metteurs en Scène témoignons de notre attachement à la défense de l’art de la mise en scène, cette « autre voix » qui, pour reprendre la formule de l’historienne du théâtre Roxane Martin, « consiste à dire quelque chose du monde présent dans l’ici et le maintenant de la représentation ».
Merci infiniment à toutes et à tous de votre présence et de votre passion.
Le rapport présente les synthèses des travaux menés lors des huit éditions dans l'hexagone et lors des visioconférences avec les artistes ultramarins.
26/01/2025
Toutes celles et ceux que nous avons rencontrés lors de ses Assises en ont témoigné : le désir de créer des spectacles, de partager de l’intelligence et des émotions, est intact et joyeux ; les metteuses et metteurs en scène l’ont largement affirmé tout au long des débats, inlassables travailleurs de leurs rêves et des nôtres, heureux de célébrer ensemble, à chaque édition des Assises, la nécessité et le bonheur de créer des spectacles, de rencontrer le public.
Cependant, ni l’addition généreuse des désirs individuels, ni la multitude des talents à l’ouvrage, ne suffisent à réenchanter l’avenir et la méta-structure qui parait déterminer le monde du spectacle vivant s’avère un frein à le mise en œuvre d’une action commune. Faut-il y voir une manifestation supplémentaire d’une société française qui ne parvient pas pour le moment à réinventer un contrat national, où les artistes pourraient cependant jouer un rôle d’éclaireurs ?
Au commencement des Assises, ce constat prit la forme d'une intuition lorsque, à rebours des approches habituelles pour analyser un secteur professionnel, naquit l'idée de lancer une véritable consultation nationale pour mieux comprendre une profession mal connue. La question initiale s’énonçait en peu de mots : qu'est-ce qu'être metteuse ou metteuse en scène aujourd'hui ?
Si la question n'est pas nouvelle, la méthode employée pour y répondre bouleverse profondément les us et coutumes d'un milieu professionnel morcelé, bien plus habitué à une vision verticale de son organisation qu'à une appréhension horizontale et ouverte de ses enjeux.
Pour répondre à cette légitime et utile interrogation initiée par le Syndicat National des Metteuses et Metteurs en Scène, il convenait de s'adresser en premier lieu aux intéressés eux-mêmes, en mettant en œuvre une démarche démocratique nouvelle, au plus près des réalités de terrain, sans présupposés, sans surplomb, sans vision pyramidale, en sympathie avec un art situé au carrefour de toutes les pratiques professionnelles du spectacle vivant. Artistes, auteurs, le plus souvent initiateurs et porteurs des projets, les metteuses et metteurs en scène se tiennent à la croisée de toutes les problématiques du spectacle. L’anonymat collectif de cette profession, peu définie, mal encadrée, symboliquement ambivalente entre pratique d’un métier et exercice d’un art, laisse la plupart de ses artistes dans une ombre que ceux qui sont portés aux nues ne parviennent pas à éclairer.
C’est donc une démarche volontairement participative que nous avons engagée, en nous déplaçant au plus près des artistes, au plus près de leurs espaces et territoires de travail, en pratiquant un tour de France totalement inédit. En soumettant un ensemble de questions, volontairement vaste, à l’épreuve du travail en ateliers, nous voulions que toutes les dimensions du métier et de l’art de la mise en scène soient sollicitées, afin d’ouvrir le plus largement le champ de la réflexion et la possibilité pour chacun et chacune de formuler des propositions.
Cette approche a permis de laisser dire, d’écouter et d’entendre, dans le respect et l’attention. Les débats qui nourrissent les synthèses de ce document ont fortement exprimé un hiatus entre la capacité - démontrée de fait par les Assises - de construire un dialogue collectif et le ressenti d’une forme d’indifférence du "système", confinant parfois au mépris, dont la traduction intime renvoie au vécu quotidien de la solitude du metteur en scène.
À l’image de la crise démocratique que traverse notre pays, la crise de sens et de reconnaissance du spectacle vivant s’alimente par la rupture entre projet individuel et projet collectif. Elle est accentuée, au fil des ans, par le dédain à l’égard des corps intermédiaires et des organisations représentatives, par la certitude que les solutions aux scléroses du système de production et de diffusion du spectacle proviendraient exclusivement de l’engagement de réformes verticales non débattues, par l’empilement des réformes et des dispositifs, par la tentative de masquer le défaut de projet politique par un accroissement des normes, par le fait de céder la régulation de notre secteur aux mécanismes de la concurrence, par la disparition insidieuse de l’intérêt porté à l’art et la culture dans la vision du pays. Les très vives tensions économiques et politiques qui se sont récemment exprimées, les postures et les décisions radicales et désinhibées de certains élus, laissent à penser que la régression serait en mouvement.
Certes, l’amplitude des thématiques mises au travail a pu générer une forme de frustration de ne pouvoir approfondir suffisamment chacune d’entre elles. Mais cette consultation nationale sans précédent prouve que le monde du spectacle vivant est traversé par des questionnement et des défis qui relèvent, comme pour l’ensemble de la nation, de la citoyenneté, de la cohésion, de la précarité des conditions d’exercice des métiers, de la reconnaissance symbolique et économique du travail, de la capacité à relever les défis contemporains, ceux de l’égalité, de la diversité, de l’environnement. Alors que les tentations populistes menacent l’essence même de notre vie en commun, qu’elles pourraient dès demain transformer l’errement institutionnel du moment en une réponse autoritaire et démagogique qui fractionnerait le pays, le monde de l’art, de la recherche, de l’éducation, est-il en capacité de briser cette logique du renoncement pour proposer une autre voie ? Les propos que nous avons rassemblés au long de ce tour de France, pour peu qu’ils se transforment en action collective, pourraient nous donner à espérer que rien n’est inéluctable.
Le second constat légitime les synthèses établies par les Assises Nationales de la Mise en Scène, dont la conduite n’a pas prétendu à l’exhaustivité, n’affirmant pas un caractère scientifique tel qu’un sondage pourrait le mettre en œuvre. Mais tout de même, ce tour de France qui a rassemblé plus de mille participants, induit dans sa dimension, dans l’ambition des thématiques, dans le volume de travail collectif, que l’on y regarde de près. Se dévoilent bien plus de convergences dans les analyses que de dissensus. Le commun l’emporte très largement sur le singulier, quels que soient les territoires concernés, quels que soient les parcours des artistes, et même, quels que soient leurs niveaux de reconnaissance institutionnelle. Si l’on identifie des effets générationnels indéniables dans les réactions et les solutions envisagées, les propositions dessinent des chemins partagés qui invitent tous les acteurs institutionnels du spectacle, à tout le moins, à les visiter ou à les emprunter. A les considérer, car c’est souvent de considération qu’il s’agit.
Nous constatons dès lors un paradoxe entre le sentiment de solitude martelé à chaque édition et la convergence des points de vue, qu’il s’agisse des désirs, des constats, des manques ou des solutions exprimées. Alors que faudrait-il pour transformer cette convergence en projet commun, de la formulation à l’action ? C’est une des interrogations que le métier se renvoie à lui-même, à l’échelon individuel et à celui des institutions qui l’accompagnent.
Puisse les Assises Nationales de la Mise en Scène contribuer à cette refonte.
Je veux ici remercier très chaleureusement les personnes qui m’ont confié la direction des Assises Nationales de la Mise en Scène, estimant – je crois – que bienveillance et expérience pouvaient concourir à la réussite de cette entreprise : Cyril Le Grix, le président du Syndicat National des Metteuses et Metteurs en Scène, son conseil d’administration et la commission des Assises, mais aussi l’équipe avec laquelle nous avons partagé cette aventure humaine et professionnelle. Je remercie chaleureusement les rapporteuses des ateliers pour la qualité de leur travail et leur disponibilité.
Je remercie également tous les partenaires, tous ceux qui ont accompagné ce projet, qu’il s’agisse des convaincus de la première heure ou des convertis de la dernière. Enfin et surtout, je remercie tous ceux qui ont apporté leur contribution à la réflexion collective, pour leur engagement et leur passion.
26/01/2025
TOUS DROITS RESERVES SUR LES IMAGES
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LE GRAND PRIX 2024
Un grand merci à l'équipe de Sport Photo, Gilbert Benedicto, Madjid Bouzar, Philippe Simon, Philippe RIchard, Roger Séguier
et à nos partenaires
28/11/2023
Fondées sur une volonté de concertation et de dialogue, ces Assises Nationales de la Mise en Scène auront pour étapes Lille, Rennes, Poitiers, Toulouse, Marseille, Lyon, Nancy et Paris, nous permettant de couvrir quasiment l’ensemble du territoire. Les lieux, artistes et organisations partenaires de ces Assises témoignent de la diversité de la démarche et de la volonté d’ouvrir la réflexion à l’ensemble des acteurs du théâtre, sous toutes ses formes.
Les Assises nationales de la Mise en Scène se présentent comme le prolongement inédit de réflexions déjà engagées par le syndicat et d’autres acteurs de la vie théâtrale en France ou en Europe, et se construiront en partenariat avec l’ensemble des organisations professionnelles (syndicats, organisations professionnelles, centre ressource, sociétés civiles, agences régionales et territoriales pour le spectacle, etc.).
QUELQUES ENJEUX QUI ORIENTERONT LES DÉBATS
• Construire une réflexion partagée, avec le plus grand nombre, sur nos pratiques respectives ;
• Définir plus précisément les contours de cette profession et de la pratique globale de ce métier, qui ne résume pas aux répétitions d’un spectacle ;
• Accompagner l’évolution d’une profession devant les bouleversements des modalités économiques et environnementales du secteur en interrogeant les problématiques de production et de diffusion des œuvres ;
• Relever les défis matériels, technologiques qui conditionnent la création de l’œuvre ;
• Questionner les nouveaux langages de la mise en scène ;
• Promouvoir le rôle des metteuses et metteurs en scène dans l’éducation artistique et culturelle ;
• Promouvoir le respect de la personne humaine : prévention du harcèlement et des violences sexuelles, lutte contre les discriminations, représentation de la diversité, égalité femme/homme ;
• Face au désert de formation de ce métier, interroger les moyens de se former à la mise en scène en parcours continu ou initial ;
• Étudier les voies et moyens pour mettre en place un observatoire artistique et professionnel de la mise en scène.
DES ASSISES POUR QUI ET AVEC QUI ?
Ces Assises s’adressent à l’ensemble des metteuses et metteurs en scène, dès lors que cet art est pratiqué dans des conditions professionnelles, afin d’instruire le plus largement possible le débat au sein de la profession. Elles sont conçues sans critère restrictif (esthétique, branche professionnelle, mode de production, typologie de public, etc.). Les Assises sont ouvertes également aux femmes et aux hommes concernés ou intéressés par cet art.
D’autre part, ces assises sont conçues à partir des territoires de manière à refléter la diversité et les spécificités de nos pratiques artistiques respectives. L’objectif est de mettre en place une vision collective et partagée de notre profession. Afin de couvrir l’ensemble du territoire national, nous avons élaboré un circuit de sept villes en région (Lille, Rennes, Poitiers, Toulouse, Marseille, Lyon et Strasbourg) qui accueilleront les Assises pour une journée, suivi d’une plénière à Paris.
CONSTRUIRE UN DIALOGUE FRUCTUEUX
Notre volonté de créer un dialogue ouvert et constructif repose sur la conviction qu’une réflexion collective est nécessaire pour accompagner les mutations du spectacle vivant de manière harmonieuse et équilibrée.
En réunissant, autour des professionnels de la mise en scène, le ministère de la Culture, les organisations professionnelles, les collectivités et agences en région, le Syndicat National des Metteuses et Metteurs en Scène souhaite mettre en place un espace d'échange dynamique où les idées peuvent être partagées, les expériences valorisées et les préoccupations entendues.
Des stratégies communes nous permettront de relever les défis nombreux et complexes de notre profession, les solutions procédant d’une véritable concertation intra professionnelle et d’une coopération élargie à l’ensemble des acteurs du spectacle vivant.
D’autres informations suivront… Restez connectés à cet événement !
30/10/2023
Né à Narbonne sous la houlette de son fondateur, Gilbert Benedicto, le Festival Sport Photo, initialement intitulé Sport Folio, présidé aujourd'hui par Philippe Simon, débarque à Paris en 2019 dans l'idée de se rapprocher de l'épicentre des Jeux olympiques et paralympiques Paris 2024. Après une magnifique édition au Carreau du Temple, la crise sanitaire de la COVID arrête prématurément l'aventure parisienne.
En 2024, le Concours international et le Festival se tiendront à Gruissan, connue pour son implication sportive et culturelle, en bord de mer, sous l'impulsion de son maire, Didier Codorniou, également Vice Président de l'Occitanie, qui fut un grand joueur de rugby.
Partout dans le monde, les photos de sport sont les plus diffusées qui soient. Les plus belles restent cependant ignorées du grand public, victimes en particulier d'une actualité trop éphémère. C'est pour mettre en lumière les chefs d'oeuvre du genre que le Festival international de la photographie de sport a vu le jour.
Aucun festival n'existait pour célébrer les plus belles photographies alors que certaines images sont devenues de véritables icônes, ancrées dans la mémoire collective. Sport Photo, désormais Gruissan Sport Photo, célèbre les plus belles images du sport prises autour du monde.
Colonne vertébrale du festival, le Concours International de la Photographie de Sport a invité la communauté internationale des photographes professionnels à inscrire leur photos dans 6 catégories : action, reportage, insolite, sports extrêmes, hors-stade et meilleure série personnelle.
Pour exemple, en 2021, ce sont 33 pays, 394 photographes, qui alimentent le Concours avec 5614 photos et 166 reportages. Il 'n'y pas d'équivalent au niveau international, le Festival disposant d'un fonds international d'images tout à fait extraordinaire.
Sport Photo a déjà produit plusieurs grandes expositions, à Narbonne, au Pavillon de la France à l'exposition universelle de Dubaï, au Carreau du Temple à Paris, au Salon de la Photo de Paris, à Sciences Po, au Carroussel du Louvre, au Musée du sport de Nice, aux halles de Carcassonne... ainsi qu'une magnifique édition publiée par Marabout/Hacette, "le Meilleur du Sport".
28/05/2023
Le Centre National du Théâtre est un des premiers centres ressources à avoir vu le jour dans le paysage très morcelé de la ressource en France, à une époque où les outils de communication et d’information étaient totalement différents. Le projet est né en 1991 et a été mis en place entre 1992 et 1993. Depuis, le paysage a totalement changé. D’une part, la cartographie professionnelle du théâtre a beaucoup évolué dans sa structuration, ses acteurs... L’implication grandissante des collectivités territoriales dans le financement de la culture et du théâtre en particulier a également joué. Esthétiquement, des formes artistiques qui n’étaient pas forcément les plus visibles à l’époque sont apparues. Il y a par exemple un retour à l’envie de troupe, qui existait beaucoup moins il y a vingt ans, et l’émergence des collectifs d’acteurs qui sont très importants.
Quels sont les grands axes de votre projet pour le CNT ?
Le CNT est un des premiers centres ressources à avoir vu le jour dans le paysage très morcelé de la ressource en France, à une époque où les outils de communication et d’information étaient totalement différents. Le projet est né en 1991 et a été mis en place entre 1992 et 1993. Depuis, le paysage a totalement changé. D’une part, la cartographie professionnelle du théâtre a beaucoup évolué dans sa structuration, ses acteurs... L’implication grandissante des collectivités territoriales dans le financement de la culture et du théâtre en particulier a également joué. Esthétiquement, des formes artistiques qui n’étaient pas forcément les plus visibles à l’époque sont apparues. Il y a par exemple un retour à l’envie de troupe, qui existait beaucoup moins il y a vingt ans, et l’émergence des collectifs d’acteurs qui sont très importants.
Vous faites, par exemple, référence aux collectifs pluridisciplinaires ?
Oui, même si le théâtre a toujours été un art qui croise les disciplines. Le transdisciplinaire, le dialogue entre les disciplines, ne sont pas nés avec l’apparition de la vidéo. Le théâtre grec était dans cette logique, le théâtre romain mêlait musique, pantomime, diction, Molière travaillait avec Lully, etc. Ce qui évolue, ce sont les périodes esthétiques au cours desquelles on affirme plus ou moins des modes d’écriture ou des langages. Les outils techniques évoluent aussi. Nous avons aujourd’hui des technologies scéniques qui n’existaient pas il y a quelques années, mais cela est vrai pour chaque époque. Par exemple, les projecteurs automatiques aujourd’hui permettent de créer sur un plateau de théâtre des effets qu’on ne pouvait pas voir il y a quinze ans. Et donc on écrit autrement l’espace.
Ce qui est également fondamental, c’est évidemment la mutation majeure sur le plan des technologies de la communication. Nous ne sommes plus en train de constater l'entrée dans l’ère numérique ; nous sommes déjà confrontés à son évolution : transition du web 2.0 vers le web 3.0, open data, mode collaboratif d’information, avec tous les enjeux d’exigence intellectuelle en termes de contenus qu’il faut développer en parallèle.
Nous sommes à un moment d’évolution des techniques donc d’évolution des pratiques pour délivrer l’information. L’immédiateté, la duplication de l’information, la réplication de la donnée, créent un contexte tellement différent de ce qu’il était au moment de la naissance du CnT qu’il y a pour nous un défi de modernisation de l’outil. Nous devons faire en sorte qu’il soit, dans sa conception, dans l’information qu’il gère, et dans sa capacité à la restituer, conforme aux modes d’approche de l’information qu’a le public aujourd’hui. C’est l’enjeu numéro un, l’axe prioritaire.
Comment comptez-vous procéder ?
Moderniser l’outil, cela veut dire disposer des outils techniques en interne répondant à cet objectif et être en capacité d’échange avec toutes les autres plateformes d’information, dont certaines n’ont pas forcément un rôle national mais qui contribuent à l’information nationale. Je pense à la société d’histoire du théâtre, à la BnF (Bibliothèque nationale de France), à la maison Jean-Vilar à Avignon, à la maison Antoine-Vitez hébergée dans nos murs, aux Archives du spectacle, etc. Il est du rôle d’un centre national d’être un carrefour d’informations. Nous n'avons pas vocation à rassembler toute l’information au sein même du CnT mais nous devons être capables de la mettre en réseau et de fédérer les initiatives.
Aujourd’hui si vous faites une requête, vous obtenez en premier lieu des réponses Google ou Wikipédia. Notre objectif n’est pas de les concurrencer, ce serait absurde. Nous devons déterminer à quel endroit nous apportons une valeur ajoutée. Cela constitue mon deuxième axe de travail : la dimension éditoriale. Il ne suffit pas de rassembler des données, il est indispensable de les prioriser, hiérarchiser, organiser, sélectionner et d’y apporter un commentaire. C’est tout l’enjeu pour nous. La ressource doit être en capacité de proposer du rédactionnel, que ce soit sur des approches thématiques d’ordre patrimonial ou documentaire (l’histoire du théâtre, de la décentralisation théâtrale, des esthétiques, la pédagogie théâtrale au XXe, etc), des questions d’actualité, une valorisation du travail des auteurs, ou encore les questions juridiques. Il faut arriver à construire une bonne dialectique entre la mise en place des outils que j’ai évoqués et cette dimension rédactionnelle. Nous ne devons pas travailler uniquement sur les « tuyaux » mais sur les contenus. C’est notre métier. L’important est l’adéquation entre les deux. Le conseil, l’accompagnement et l’orientation relèvent de la mission d’un centre ressources.
Le CnT est également un observatoire privilégié de la vie du secteur...
Le renforcement de l’observation du secteur théâtral est le troisième axe de mon projet. Le déficit d’observation du spectacle vivant est signalé depuis très longtemps. Le CnT est un des organismes à s'être déjà investi dans l’observation. Le ministère de la Culture et de la Communication mène une réflexion sur une plateforme de l’observation. Le projet de loi d’orientation sur la création artistique évoque ainsi un observatoire ayant pour mission d’éclairer les acteurs économiques, politiques et professionnels sur tous les secteurs de la création.
Il faudrait que nous soyons capables de présenter une sorte de photographie, hiérarchisée sur plusieurs plans, de ce qui constitue la vie du théâtre en France du point de vue sociologique, économique, artistique, etc. Il y a sans doute 20 à 30 chiffres clés à produire. Le CnT ne sera pas capable à lui seul d’apporter toutes les réponses mais il faut que la refonte de son système d’information intègre cette volonté d’observation. Si on essaye de délivrer à une profession, un public, des acteurs économiques ou politiques, des collectivités ou des mécènes, une idée de ce qu’est la vie du théâtre en France, (combien de spectacles, combien de spectateurs, combien d’artistes, comment s’exporte le théâtre français, qu’est-ce qu’on accueille, etc), nous ne sommes pas en mesure de rassembler rapidement des données en garantissant totalement leur fiabilité. Pouvoir fournir des données du type prix moyen du billet, cela participe à la fois de l’analyse d’un secteur et de sa communication.
Tout cela se construira en lien étroit avec le ministère. Si l’on prend pour exemple la parité et la place des femmes dans la vie du spectacle en France, il faudrait que nous soyons en mesure de renseigner cette question, de façon rapide et objective. Nous devons pouvoir être factuels dans un premier temps et, ensuite, nous pouvons réfléchir à apporter un commentaire. Je souhaite qu’il y ait, à terme, la publication d’un petit rapport annuel sur les chiffres-clés, sous une forme très simple. L’idée sera de disposer de quelques indicateurs donnant une photographie du secteur, d’être capable de les suivre dans le temps et donc de pouvoir dégager des tendances. Nous sommes au cœur de cette réflexion et nous devons la mener en coordination avec les autres centres ressources. La vie macro-économique du spectacle n’est pas organisée par tranches.
Comment imaginez-vous la vie du CnT en tant que lieu physique ?
C'est mon quatrième axe : la poursuite de tout ce qui, fort heureusement, n’est pas dématérialisable. La performance que nous visons en termes d’outils numériques doit nous dégager du temps, de l’espace, voire des moyens, pour tout ce qui n’existe que dans le rassemblement et dans la mise en œuvre de l’humain : l’accueil physique des personnes - qu’il faut maintenir-, les rencontres, le conseil aux professionnels ou les débats plus esthétiques.
Le Festival d’Avignon souhaite installer son antenne parisienne au CnT. Nos relations avec le Festival vont s’intensifier et la présence du CnT pendant le festival sera plus importante. Nous allons également travailler plus étroitement avec la Maison Jean-Vilar et tout le réseau des lieux qui soutiennent les écritures, comme par exemple La Chartreuse ou Théâtre Ouvert.
Je souhaite que ces rencontres d’information et débats théoriques conservent une forme de convivialité et que le CnT demeure un endroit de la parole partagée. Nous sommes en train de réfléchir à un programme de rencontres pour l’année à venir.
La mémoire du théâtre est-elle un axe de travail pour le CnT ?
C’est un énorme enjeu. Les premiers dépositaires de la mémoire du théâtre sont les gens de théâtre. Cette profession a peut-être une approche insuffisante des questions de préservation et de transmission de sa mémoire. C’est beaucoup plus facile à faire quand on travaille sur un objet artistique duplicable. Le théâtre est éphémère, volatile, cela rend le travail de mémoire plus compliqué et demande un effort accru.
N’est-ce pas aussi une question de culture ? Le secteur de la danse semble s’être davantage emparé de cette question.
Tous les arts dont l’expansion est récente (la danse contemporaine, le cirque contemporain, etc.) ont éprouvé le besoin identitaire d’affirmer qu’ils constituaient une œuvre, un répertoire et une mémoire. Le théâtre, assis sur un socle de plusieurs centaines d’années d’existence, n’éprouve pas cette même urgence. Nous devons faire partager la prise de conscience collective que le théâtre doit préserver et valoriser son patrimoine. Le CnT y prendra bien sûr sa part de responsabilité mais cela exigera des moyens dédiés à cette action.
Un accord a été mis en place entre l’Ina (Institut national de l'audiovisuel) et le CnT pour le site « En scènes » et nous poursuivrons les échanges. La mémoire ne doit pas se résumer aux spectacles, elle est également constituée des gens qui ont fait le théâtre et de l’histoire du théâtre. Beaucoup d’endroits cachent des trésors, plus ou moins accessibles. Le fonds de la Société d’histoire du théâtre, par exemple, dispose de mille mètres linéaires de documents hébergés par la Bnf, difficilement consultables. Dans tous les théâtres, il y a une mémoire. Mais recenser les archives ne suffit pas, il faut un appareillage critique pour les accompagner et les rendre accessibles. Nous avons besoin d’intellectuels et d’historiens, de gens qui observent le patrimoine, l’analysent, le mettent en perspective. Il ne suffit pas d’emmagasiner des captations ou des documents audiovisuels, photographiques, il faut un traitement éditorial. Il y a une différence entre ce qui est disponible et ce qui est accessible. Donner accès, c'est proposer un « regard sur », dégager des priorités. Nous devons travailler à donner un sens à cette matière disponible.
La question de la mémoire, du patrimoine fait aussi partie de l’éducation artistique à l’endroit des amateurs, des élèves ou des professionnels. Les conservatoires, par exemple, sont des lieux de mémoire et de patrimoine majeurs. Ce sont donc des partenaires naturels du CnT.
Et puis nous avons la volonté de réfléchir à des enjeux de sens. Il est important qu’il y ait des contributions de critiques, d’intellectuels, de chercheurs.
Le CnT a-t-il vocation à intervenir dans le domaine international ?
Il n’existe pas à l’heure actuelle, au CnT une tradition de travail sur l’international. Ce n’est pas une mission qui lui a été confiée au cours du temps. Cela constitue pourtant, selon moi, un axe de développement nécessaire pour le centre ressources. Les artistes portent cette dimension et n’ont pas attendu les institutions européennes pour travailler ensemble en Europe. Mais nous, nous sommes un peu en retard. Il est important que le CnT développe des relations avec les théâtres étrangers et avec ses équivalents, qui peuvent exister comme aux Pays-Bas ou en Finlande par exemple. Ils n'ont pas nécessairement le même format que le nôtre mais nous pouvons rencontrer des interlocuteurs dans beaucoup de pays.
Le secteur théâtral est concerné par le projet de loi d’orientation sur la création artistique en cours. En tant qu’expert du secteur, que pensez-vous de ce projet ?
Je suis favorable à ce qu’il y ait une loi pour la création, qui ne doit pas être uniquement une loi d’organisation mais affirmer un certain nombre de valeurs et de fonctions assumées par l’État alors qu’on aborde une nouvelle étape de la décentralisation. Cette loi peut être un outil, y compris dans la décentralisation, si le rôle de l’État y est clairement défini. Dans les valeurs que la loi doit affirmer, la question de la création est centrale.
Quel constat faites-vous sur la situation des compagnies indépendantes dont la précarisation semble croissante ?
C’est une réalité. Il faudrait être aveugle pour ne pas voir qu’il y a une vraie difficulté professionnelle, notamment en termes de production. Quand on regarde comment fonctionne le système, on constate un déséquilibre entre la production et la diffusion. Le secteur qui vit de façon la plus violente la crise c’est celui de la production, de l’institution jusqu’aux compagnies, mais c’est évidemment beaucoup plus dur pour les compagnies. Elles sont plus en difficulté qu’elles ne l’étaient. C’est de la stricte observation.
Du point de vue du CnT, ce qui m’intéresse est d’opérer une synthèse et de se demander, une fois que l’on a établi ce constat économique, quelles en sont les conséquences esthétiques. Quelles sont les conséquences sur les pratiques de production ? Le mouvement des collectifs est intéressant de ce point de vue. On ne peut pas dissocier la façon pratique et esthétique de faire du théâtre de son économie, je suis convaincu de cela. On ne peut pas dissocier l’aventure d’Ariane Mnouchkine de la façon dont elle a conduit son projet et donc son entreprise. C’est intimement lié. On ne crée pas un spectacle de la même façon si l’on vit dans une grande institution allemande, un théâtre national à Paris, un centre dramatique de petit format ou simplement en compagnie. Un spectacle raconte toujours des choses sur la façon dont on l’a construit. Certains artistes montent encore des productions ambitieuses, avec des distributions importantes comme "La bonne âme de Se-Tchouan" aux Ateliers Berthier mis en scène par Jean Bellorini ou le prochain travail de Sylvain Creuzevault sur "Le Capital" de Marx. Leurs démarches sont passionnantes car elles illustrent un refus d’être surdéterminés par les conditions actuelles de production et une volonté de vérifier que l’on peut travailler autrement, chercher d’autres voies. Le premier problème à traiter est celui de la production.
Quels pourraient-être les leviers d'intervention ?
Le CnT gère la commission nationale d’aide à l’écriture. Ce n’est pas une commission du CnT mais une commission nationale gérée par le CnT sur des crédits d’État. Notre rôle est d’accompagner mieux les auteurs et de faire en sorte que les textes primés soient davantage montés, plus en lien avec les metteurs en scène actuels et plus longtemps joués. Un texte de théâtre n’existe vraiment que lorsqu’il est joué. Cette dimension de notre travail est une contribution à la réflexion générale sur les conditions de paupérisation de la production. Elle concerne toutes les strates et a des conséquences sur la réactivité et la capacité à monter des spectacles avec une certaine immédiateté.
La volonté du ministère de la Culture et de la Communication de favoriser les séries de représentation peut-elle constituer une réponse aux difficultés que rencontrent les compagnies ?
Se préoccuper du nombre de série de représentations faites par spectacle et dans chaque lieu est important, bien sûr. C’est une réponse, parmi beaucoup d’autres possibles. Encore une fois, ma conviction est qu’on ne règle pas la question uniquement par la diffusion. Diffusion et production sont étroitement liées mais vous ne régulez pas le système uniquement en travaillant sur la distribution. Il faut travailler sur les modes et les conditions de production. Il s’agit d’un sujet éminemment sensible car il pose des questions sur la nature, la quantité, l’évaluation de ce qui est produit. Ce sont des questions délicates mais c’est là qu’il faudrait prendre des décisions majeures.
23/04/2023
En 1984, tout jeune comédien, je croisais Maurice Sarrazin – une légende ! - qui allait m’embarquer dans un des ses rêves de théâtre, mettre en scène Cyrano de Bergerac d’Edmond Rostand. Tout d’abord avec Denis Manuel dans le rôle-titre, puis Maurice reprenait lui-même le rôle, me battant à l’épée tous les soirs dans la fameuse scène du duel et de la tirade des nez. Puis il quittait le Grenier de Toulouse, centre dramatique national, Jacques Rosner en reprenant la direction.
Ce fut une belle rencontre, de celles qui marquent la vie artistique de quelqu’un. Il voulut m’emmener à Paris dans son école, lorsqu’il ajouta à son activité celle de pédagogue mais, finalement, ce fut l’Afrique qui l’emporta pour y vivre d’autres aventures de théâtre.
Maurice était un très grand acteur. Je me souviens encore de sa présence sur scène. Dans tous les spectacles où je l’ai vu, ceux de Jean-Pierre Bisson, les siens…, il occupait magistralement le plateau.
Le théâtre est un monde éphémère où l’oubli le dispute parfois au défaut volontaire de mémoire. Inventer le théâtre de demain, c’est aussi savoir d’où l’on vient.
Nous sommes tous les héritiers de cette génération de pionniers.
A lire et à regarder :
https://www.ina.fr/ina-eclaire-actu/video/i07320205/maurice-sarrazin-et-le-grenier-de-toulouse
https://www.youtube.com/watch?v=dwU9FrlQEnw
https://www.ina.fr/ina-eclaire-actu/video/caf88044286/un-grenier-pas-ordinaire
L'hommage du Théâtre Sorano : https://www.theatre-sorano.fr/hommage-a-maurice-sarrazin-18-mars-1925-11-avril-2023/
L'hommage du Théâtre de la Cité
13/10/2022
L'action publique pour la culture s'inscrit dans une longue histoire, marquée par la reconstruction qui a suivi la seconde guerre mondiale et dont on sous estime l'exemplarité et l'héritage. Affirmer cela, ce n'est pas nier les ruptures culturelles et sociales qui fractionnent la société française et opposent les cultures populaires et les cultures savantes, dans une partition pensée comme une hiérarchisation esthétique. C'est au contraire former l'espoir que cet héritage saura vaincre les replis identitaires et communautaires, demeurant en cela dans l'idéal républicain.
L’air du temps
En juillet 2020, le baromètre de l’IFOP indiquait, au sortir d’un premier confinement et encore au cœur de la crise sanitaire, que 93% des Françaises et des Français exprimaient un manque vis-à-vis des activités culturelles, événementielles et sportives. Pour le spectacle vivant, 82% des spectateurs ressentaient ce manque et 100% d’entre eux affirmaient vouloir se rendre à nouveau au spectacle dès que possible. 86% des jeunes exprimaient la même frustration et le même désir pour les festivals. Pourtant, que constate-t-on en 2022 ? La fréquentation dans les salles de cinéma et de spectacle vivant en ce début d’année montre une baisse d’environ 25 % par rapport à la même période avant la crise sanitaire[1], malgré les efforts considérables consentis par les institutions culturelles, les artistes, les pouvoirs publics.
Dans le même temps, une étude de l’IFOP pour Hadopi indique une intensification de la consommation culturelle numérique à domicile, et par voie de conséquence, une modification des pratiques culturelles et sociales. Le baromètre du numérique de l’ARCEP en 2021 donne dix chiffres clés qui confirment cette tendance, notamment l’augmentation substantielle du temps passé par les Français devant les écrans (pour une semaine : 19 heures devant la télévision, 19 heures sur Internet, 6 heures de vidéos en ligne), l’augmentation des équipements numériques par foyer (smartphone, tablettes) et la diminution de l’âge des usagers (44 % des 12-17 ans ont eu leur premier téléphone avant l’âge de 12 ans).
Par ailleurs, la relation des Français aux institutions est également agitée de contradictions, - comme l’indiquent les études du CEVIPOF[2]-, faite d’attachement et de rejet, de suspicions, de revendications pour le service public qui pour autant coûterait trop cher, et parfois d’ignorance.
J’ai souhaité rapporter ces éléments chiffrés car aucun équipement culturel ne peut désormais faire l’économie de ces enjeux pour se penser dans l’avenir et dans sa relation à l’art, à la population, au partage. Quel avenir pour les lieux du spectacle vivant, les musées, les bibliothèques, les lieux d’une relation durable à l’art éphémère ? Quelles transformations nécessaires des institutions de la culture ?
La réforme est un processus, pas un événement. (Koffi Annan)
Peut-on transmettre les valeurs qui ont fondé les réseaux des équipements publics de la culture sans accompagner les profondes mutations sociétales et technologiques qui, dans le même temps que les droits culturels étaient reconnus par le législateur, présentent également tous les dangers de l’individualisme, du repli sur soi, des communautarismes, de la segmentation sociale, et des « identités » culturelles brandies comme autant d’étendards anti-républicains ? Il me semble que c’est précisément le défi que doivent relever les collectivités et l'état, défi qui ne saurait être envisagé sans un partage de l’analyse et des solutions avec les professionnels.
L'institution ne peut-elle se réformer que par sa marge, notamment les "tiers-lieux" qui feraient office de réponse innovante à l'inertie de mutations pourtant inévitables ? Il faut certainement retrouver, sous une autre forme, l’esprit des pionniers de la décentralisation culturelle.
[1]Source : intervention publique de Madame Roselyne Bachelot, ministre de la Culture, en février 2022.
[2]Voir le baromètre du CEVIPOF de janvier 2022 sur les Français et les institutions
30/01/2005
Paris, le 31 janvier 2005
Monsieur le Ministre,
Vers quelle politique culturelle pour le spectacle vivant allons nous ?
Au cœur de la crise profonde qui agite depuis des mois tous les acteurs du spectacle vivant, la Direction de la musique, de la danse, du théâtre et des spectacles a remis à la profession, fin 2004, un document intitulé «Propositions pour le spectacle vivant». Présenté comme un texte d'étape, à discuter, ce rapport témoigne de la volonté de la direction centrale de définir des orientations nouvelles pour nos professions, alors que la crise de l'intermittence déclenchée en juin 2003 a démontré qu'une refondation des politiques publiques pour le spectacle vivant est d'une absolue nécessité.
Les diverses analyses et nombreux rapports nés de cette crise dite «de l'intermittence», qu'ils émanent de syndicats, d'organisations professionnelles, d'experts ou de parlementaires, placent peu ou prou tous les partenaires institutionnels devant leur responsabilité.
Les partenaires sociaux tout d'abord, qui sont renvoyés pour les employeurs à un examen complet des conventions collectives - du privé et du public - et des contrats de travail, qui sont renvoyés pour les salariés aux négociations interprofessionnelles au sein de l'UNEDIC.
Mais aussi les pouvoirs publics, Etat et collectivités territoriales, qui ont largement participé des dérives d'un système d'indemnisation du chômage dont tous les acteurs responsables souhaitent aujourd'hui l'assainissement et la pérennité.
Oui, monsieur le Ministre, nous sommes convaincus qu'il faut désormais fonder un nouveau contrat social pour nos professions du spectacle, appuyé notamment sur des financements à la hauteur des politiques publiques menées ou des ambitions affichées, sur la définition plus claire de nouveaux champs conventionnels, sur des principes d'indemnisation du chômage plus vertueux et incitatifs à la déclaration du travail.
Or, quel constat peut-on dresser en ce début d'année 2005 ?
Nous avons accumulé les analyses et les propositions; les travaux de M. Guillot, expert indépendant que vous avez nommé, ont conforté bon nombre de propositions du SYNDEAC ou d'autres organisations professionnelles. Dans le même temps, vous mettiez en place un fonds transitoire financé par l'Etat et géré par l'UNEDIC pour compenser les effets les plus dévastateurs du protocole signé en juin 2003.
Votre volonté de dialogue a enclenché un processus nouveau. Mais il est inachevé. L'espoir est grand et la concrétisation demeure brumeuse. Nous sommes, monsieur le Ministre, placés devant un réel problème de calendrier. Il est urgent de mettre au travail les partenaires sociaux pour négocier un nouveau protocole d'assurance chômage des intermittents. Nous vous demandons, d'organiser dans les plus brefs délais avec votre
collègue ministre de l'Emploi, du Travail et de la Cohésion sociale, une véritable concertation intra-professionnelle pour proposer le cadre d'un nouveau régime de l'intermittence, avant une négociation interprofessionnelle à l'UNEDIC. À cet effet, il vous appartient de réunir dès à présent, sous l'égide du Premier ministre, un «Valois social de la Culture». La responsabilité du gouvernement à cet endroit est entière. Rappelons que les employeurs du spectacle vivant et enregistré ne siègent pas à l'UNEDIC, ce qui ne facilite pas le dialogue social.
Enfin, s'il s'avérait que l'UNEDIC ne réponde pas à l'attente de toute une profession, alors le recours à la loi serait indispensable. Les partenaires sociaux, les élus et les collectivités, les professionnels, admettent tous que cette crise sociale révèle une crise plus profonde, politique et institutionnelle. A ce nouveau contrat social qu'il est urgent de négocier, il faut adjoindre un nouveau contrat politique entre les artistes, la Nation et les institutions de la République. L'un n'ira pas sans l'autre. Qui finance quoi? Quelles institutions portent quelles politiques pour le spectacle vivant? Quelle contractualisation entre les tutelles pour mettre en œuvre une politique nationale
décentralisée du spectacle vivant?
Oui, les collectivités territoriales ont une part à prendre dans le financement de l'emploi culturel; l'actualité sociale nous le prouve. De nouvelles perspectives partenariales sont à bâtir entre elles et votre ministère. C'est là répondre à l'intérêt général pour que la France développe les acquis historiques d'une décentralisation culturelle féconde et à bien des égards exemplaire. Or ce dialogue essentiel nous semble aujourd'hui en panne. Envisagez-vous une initiative proche en direction des collectivités, en particulier les Régions?
C'est donc dans ce contexte que la Direction de la musique, de la danse, du théâtre et des spectacles avance de nouvelles «propositions pour le spectacle vivant «. Le SYNDEAC salue cette initiative, attendue, car cette administration centrale du ministère de la Culture et de la Communication nous avait accoutumés à un lourd et long silence. Ce document, où chacun pourra retrouver quelques unes de ses propositions, nous interroge tout d'abord sur la méthodologie employée. Quel dessein pour le spectacle vivant porte le ministère de la culture secoué par une crise sociale sans précédent?
Tout d'abord, force est de constater que ce document rassemble des propositions qui ne sont ni chiffrées ni datées. Aucun calendrier ne conforte les idées avancées, aucun calendrier ne renvoie à une concertation formalisée entre l'Etat et les collectivités, aucun calendrier ne met en œuvre une série de concertations avec les organisations professionnelles. Aucune proposition n'est assortie de perspectives budgétaires ou d'évaluation chiffrée. Il s'agit donc bien d'un document d'étape et de travail, à cet égard tout à fait incomplet.
Pour le SYNDEAC, au-delà de l'analyse nécessaire de leur pertinence ou de leur faisabilité, cette série de propositions aux objectifs parfois contraires, dont nous cherchons la lisibilité, ne saurait fonder en l'état le nouveau projet dont nos professions ont besoin.
Que pensez-vous de ces propositions? Les estimez-vous suffisantes ? Souhaitez-vous présenter votre politique en direction du spectacle vivant sous la forme d'un catalogue de fiches, fussent-elles pour certaines pertinentes ? Quelle place voulez-vous accorder aux organisations représentatives de nos métiers dans cette nouvelle définition des politiques ? Validez-vous la quasi absence de point de vue de ce document sur les compagnies dramatiques, chorégraphiques, et les ensembles musicaux ? Considérez-vous légitime que les directions régionales des affaires culturelles s'y réfèrent déjà dans la mise en œuvre de leur action, alors qu'aucune concertation ne s'est enclenchée à ce jour ?
Monsieur le Ministre, vous avez déclaré que vous seriez le ministre de «l'emploi culturel» et avez sans conteste favorisé et accompagné un dialogue social et professionnel indispensable. Nous vous demandons aujourd'hui une lisibilité plus grande quant à votre projet pour le spectacle vivant. Nous souhaitons résolument trouver une issue à la crise et le SYNDEAC y prendra toute sa part. Nous sommes aussi résolument déterminés à entendre une parole de l'Etat claire, qui donne à l'action de votre ministère, dans le respect de la déconcentration et des spécificités régionales, une cohérence, un équilibre, un projet. Un dessein national pour le spectacle vivant.
Je vous prie de croire, monsieur le Ministre, à l'expression de ma haute considération.
Stéphane FIÉVET
Président du SYNDEAC
09/07/2003
Déclaration lue en Assemblée générale de la profession, le 10 juillet 2003 à Avignon
Après l'annulation des festivals d'Aix, Montpellier, La Rochelle, Marseille, Rennes…, celle du Festival d'Avignon sonne comme une formidable déflagration dans notre pays. Puisse cet incontestable gâchis nous ouvrir les yeux !
La conduite de la réforme annoncée du régime des annexes 8 et 10 s'est faite au détriment de toute lucidité politique. Voilà des mois que beaucoup d'entre nous rappelons sans cesse au ministère de la culture l'urgence d'une vraie concertation pour penser, ensemble, une véritable refondation de nos modes de production. Depuis des années, le SYNDEAC s'est exprimé avec vigueur et constance pour l'ouverture d'un débat national qui interroge l'ensemble des politiques publiques pour l'Art et la Culture. Nos appels, nos interpellations, sont demeurés vains et voilà qu'au beau milieu d'une crise sans précédent on redécouvre soudain les vertus du dialogue et de la concertation.
La crise de l'emploi dans les métiers du spectacle vivant et de l'audiovisuel ne peut se réduire au simple traitement technique, comptable, d'un fonctionnement du chômage dont chacun s'accorde à convenir qu'il faut le réformer. Pour preuve, dès 2000 les organisations siégeant à la FESAC s'emparaient du problème, parvenaient à un accord avec les syndicats de salariés et proposaient des solutions. Dans le même temps, nous demandions au ministère de la culture une évaluation nationale des modes de production et de diffusion du spectacle vivant en France pour définir les termes d'une relance d'une politique nationale. Or, on a laissé aux partenaires sociaux de l'Unedic le soin d'aborder par le petit bout de la lorgnette ce qui exigeait en réalité une large focale.
Les enjeux mis à jour par cette crise ne sont pas nouveaux. Fallait-il en arriver à un traumatisme de cette ampleur pour qu'ils soient enfin posés, et qu'un ministre de la culture puisse enfin annoncer "dès septembre, un débat national sur le spectacle vivant", et le déblocage au dernier moment de 20 millions d'euros de mesures nouvelles, somme notoirement insuffisante au regard de l'ambition nécessaire ? Fallait-il ce séisme professionnel pour parvenir à une prise de conscience publique qui pose aux yeux de toute la nation l'urgence de ce débat ?
La politique gouvernementale aujourd'hui à l'œuvre accumule les signes d'une régression qui désengage la puissance publique de sa responsabilité à placer l'Art tout comme la recherche en dehors de l'unique logique économique et des règles du marché.
Mais on aurait tort d'imputer le blocage actuel au seul ministère de la culture. Voilà longtemps que les formations politiques ne développent plus aucune pensée sur un projet politique où l'Art et la culture respectivement interrogerait notre devenir et cimenterait une société libre et solidaire.
Nos professions ne se sont jamais autant parlé qu'aujourd'hui. Le formidable mouvement de solidarité qui a vu le jour doit résister aux déchirements du lendemain, aux conséquences économiques et sociales qui apparaissent déjà, aux débats sur les modes d'action à mettre en œuvre (grève ou pas grève, jouer ou ne pas jouer), pour revenir à l'essentiel.
On ne peut qu'éprouver tristesse et amertume de voir des artistes, des techniciens, des responsables d'équipements et de festivals, tous déchirés de ne pas jouer, ne pas rencontrer le public et être contraints à une telle épreuve de force.
Au sortir de cette crise estivale, les sirènes du désenchantement feront entendre leur voix. Il faut dès à présent rebondir et nourrir la solidarité qui nous a réunis. Le 14 juillet prochain, des syndicats d'employeurs du spectacle vivant, sous la coordination du SYNDEAC, invitent l'ensemble des organisations syndicales et professionnelles à une réunion de travail pour préparer ensemble le rendez vous fixé par monsieur Aillagon à la rentrée.
Stéphane FIEVET
Président du SYNDEAC
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